Musée des Beaux-Arts et de la Dentelle d'Alançon
1989
Tentures-espaces, voiles déployées à rayures rouges et blanches, mâts sans coque, mers et plages bigarrées, tatouages primitifs ou fards rituels, résidus issus du fond des temps, toujours actuels et porteurs d'avenir, squelettes de cultures et jalons de civilisation, rapport "mémoire-message" témoin de l'éternel humain, enregistré dans le langage flou des consciences ancestrales, traduit dans une modernité accessible, concentrée et minimale ; tout cela réuni, intimement soudé, ce sont les peintures et sculptures d'Armand Scholtès.
L'abstraction (c'est du moins l'opinion des grands maîtres du début du XXème siècle) prend son origine dans une situation existante. Armand Scholtès n'y échappe pas. Ce qui le distingue est que son référent ne se situe pas dans le domaine de la forme, mais dans celui de la pensée, du concept ou du contenu. Création pure (du moins apparemment) puisque dépouillée de toute référence à son environnement habituel : la forme humaine est absente, de même que l'animal, le végétal, les formes naturelles et artificielles qui nous entourent.
Compression dans la mesure où cet art rejette tout caractère descriptif ou narratif, dans la mesure où, comme aurait dit Arp, Armand Scholtès "ajoute à la nature" des formes et des objets qu'elle n'a pas connus avant lui, dans la mesure où les oeuvres naissent dans l'esprit de l'auteur, croissent et se développent dans son atelier, comme les fleurs dans les serres d'un jardinier attentif et prévenant, nourries par l'humus fécond des atavismes millénaires, grâce à leur énergie propre, selon des lois naturelles, sans toutefois effacer le caractère artificiel de toute création humaine.
Théo Wolters (extraits)